Le goût est d'abord une affaire d'odorat. La preuve: quand on est enrhubé, le dez est bouché et on de goûte blus rien.
En effet, si chaque bouchée excite les papilles gustatives de la langue, en même temps elle envoie de bonnes odeurs au fond de la gorge. Ces molécules odorantes remontent par derrière, dans le nez, où notre odorat peut les reconnaître et associer ses informations à celles de la langue.
Pour étudier çela, il faut séparer l'odorat du goût.
Une expérience consiste à envoyer, pendant qu'on mange, de l'air dans le nez; ce courant d'air reflue dans l'arrière-gorge et empêche les odeurs alimentaires d'arriver dans les fosses nasales, tout en laissant la langue libre de goûter ce qu'on lui propose.
On contate que le goût s'en trouve considérablement diminué, et que le sujet ne reconnaît plus que les sensations les plus sommaires.
Les 4 goûts de base sont le sucré, le salé, l'acide, et l'amer.
Mais autour de ces 4 classes très sommaires, que de variations... variations d'intensités, variations de la palette des goûts, avec, aussi, des goûts "inconnus" pour certaines solutions d'acides aminés...
Ces variations s'observent aussi dans les perceptions d'une même molécule goûtée par des personnes différentes: variations d'intensité et du goût lui-même!
...Nous sommes tous différents.
On peut définir toute sensation par trois paramètres: la qualité (ce qu'elle est, sans jugement de valeur), l'intensité, et l'hédonisme (le plaisir qu'elle procure).
"J'aime..." ou "J'aime pas...": que de littérature!
C'est sur la langue que tout commence.
Elle est couverte de papilles, visibles à l'oeil nu. Il y a les grosses papilles, et les petites, dans lesquelles sont situés les bourgeons du goût: des bulbes de cellules en bouquets, dont les parois comportent les récepteurs du goût: ce sont des sortes de serrures chimiques où viennent se caler des molécules de l'aliment, ce qui envoie un signal au nerf gustatif, puis au cerveau.
Ces récepteurs ne sont pas spécifiques d'une molécule particulière; c'est chaque fois un sous-ensemble des récepteurs qui est impliqué dans la reconnaissance, et qui donc excite un sous-ensemble particulier de neurones impliqués dans la sensation.
Notre cerveau se fait donc une image, un motif, une carte particulière correspondant à chaque
goût-odeur.
Pour une même personne et une même molécule, ce motif peut varier, mais il sera néanmoins toujours reconnu pour ce qu'il est: la signature de cette molécule!
Ce système permet les rapprochements, mais aussi les confusions. Par ex. une image différente, telle que le "B" peut être rapprochée du "8". C'est ainsi qu'un faux sucre, qui n'a chimiquement rien à voir avec un vrai sucre, peut nous apparaître sucré, parce qu'il implique à peu près le même groupe de récepteurs et de neurones!
Du fait de notre génétique différente, de notre histoire différente, et de notre éducation différente, chacun se fait sa propre image neuronale d'une molécule.
Et voilà pourquoi les goûts et les couleurs, ne se discutent pas!.
Alexandre Wajnberg