Beursschouwburg

Une nuit de novembre 95, le responsable de la sécurité du Beursschouwburg, rue Orts à Bruxelles, assiste à une agression qui se déroule à quelque mètres de là. Alors qu'il tente d'aider la victime, il reçoit trois coups de couteau dans l'estomac.

Cette relation de l'événement pourrait être celle d'un fait-divers journalistique.

Pour les animateurs du Beursschouwburg, ce qui s'est passé cette nuit-là, a déterminé une crise morale importante et une réflexion sur la responsabilité d'attirer des gens au centre-ville, fût ce pour des événements culturels.

Le Beursschouwburg qui, au départ était un théâtre flamand, point, a progressivement diversifié ses activités dans un esprit d'ouverture multiculturelle, jusqu'à constituer aujourd'hui ce que l'on pourrait appeler un haut lieu de résistance à la morosité ambiante.

Le quartier de son implantation est on ne peut plus diversifié: sur l'ancien axe historique qui joignait la Bourse (centre financier) et la Porte de Flandre (port de Bruxelles), il est désormais entouré de boutiques branchées, de luxe, alors que 300 mètres plus loin vivent des gens dont la situation sociale est difficile.

Cette situation particulière constitue un privilège pour les animateurs du Beurs, qui peuvent toucher un public diversifié, tout en s'impliquant dans des actions concertées avec la population du quartier.

C'est ainsi, qu'outre son café, ses concerts, ses expositions et ses autres activités artistiques régulières, le Beurs est à l'origine de "Bruxelles, ville ouverte", un mouvement d'action contre la dégradation du tissu socio-urbain et la spéculation immobilière dans le centre ville.

L'opération "Pied-de-biche", par exemple, a conduit à l'occupation de l'hôtel Central, qui après des années d'abandon était en train de devenir un des nombreux chancres urbains de la "capitale de l'Europe".

Une autre opération se déroule aujourd'hui qui vise à contrarier la mort du quartier du boulevard Jacqmain et qui consiste en la réalisation d'un potager expérimental, dans l'idée que si les propriétaires, pour des raisons spéculatives, n'entretiennent pas leurs biens, on ne peut pas empêcher les habitants de la ville d'en prendre soin.

Tout cela n'empêche pas le Beursschouwburg d'exercer ses fonctions culturelles, en exposant par exemple, les photos de Marie-Françoise Plissart sur le centre "Martini", qui par certains aspects et quoiqu'on pense de son architecture contestable, est proche du Beurs, puisqu'il est le premier bâtiment de Bruxelles à avoir réuni des fonctions diverses: commerciales, habitations privées et activités culturelles (Théâtre National).

D'autre part, en ce mois de mai finissant, le Beurs abrite le quartier général du KunstenFestival des Arts qui lui aussi a l'ambition d'offrir un refuge aux sans-abri de la culture.